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Maroc : Éclairage suite au vote historique aux Nations unies en faveur d’un moratoire universel

En décembre 2024, le Maroc a, pour la première fois, voté en faveur de la Résolution des Nations unies appelant à un moratoire sur l’application de la peine de mort. Il s’agit d’une avancée politique de taille alors que les autorités marocaines s’étaient jusqu’alors constamment abstenues lors des votes des neuf précédents textes de la résolution, introduite en 2007. Par ce vote positif, le Maroc affiche désormais une position qui concorde avec sa situation nationale, puisqu’il compte parmi les États en moratoire de fait, n’ayant procédé à aucune exécution depuis 1993.

Cette décision historique intervient alors que de nouvelles avancées tardaient à se concrétiser après trente ans de moratoire non officialisé et malgré la multiplication de signaux institutionnels et législatifs favorables à des avancées vers l’abolition de la peine capitale depuis les années 2000.

Le vote de la Résolution pour un moratoire universel aux Nations unies constitue un indicateur de l’évolution de la volonté politique des États sur la question de l’application de la peine capitale. Ce soutien inédit pourrait signifier une nouvelle étape décisive dans le cheminement des autorités marocaines en faveur d’une justice sans peine de mort, rendant la perspective de l’abolition au Maroc plus tangible et proche que jamais.

Un débat public ouvert, porté par des années de mobilisation de la société civile abolitionniste

Au Maroc, tous les acteurs ayant un rôle à jouer dans l’abolition de la peine de mort peuvent s’impliquer et débattre librement. ECPM a accompagné activement l’engagement de la société civile marocaine pour que l’abolition devienne une réalité, en déployant des efforts de plaidoyer, de renforcement des capacités et de sensibilisation considérables. Depuis plus d’une décennie, cette société civile s’est structurée autour de la thématique abolitionniste par la création d’une pluralité de réseaux aux niveaux national et régional, et par l’intégration au réseau abolitionniste mondial, ce qui lui permet de replacer régulièrement la lutte contre la peine de mort au cœur du débat public national. Sa mobilisation sans relâche, à travers des années d’actions de plaidoyer et de sensibilisation, a indéniablement contribué à ce tournant dans le vote marocain, en faveur de la Résolution des Nations unies pour un moratoire.

À ce jour, la Coalition marocaine contre la peine de mort (CMCPM) compte parmi les coalitions abolitionnistes nationales les plus actives au monde. Fondée en 2003 en marge d’un séminaire international organisé par l’Observatoire marocain des prisons portant sur la peine de mort, la CMCPM est rapidement devenue un acteur incontournable de la lutte contre la peine de mort. Elle a contribué à la création des nombreux réseaux d’acteurs abolitionnistes marocains : le Réseau des parlementaires contre la peine de mort au Maroc (2013), comprenant à son origine plus de 250 parlementaires de toutes tendances politiques, en dehors du Parti de la justice et du développement ; le Réseau des avocat·es contre la peine de mort au Maroc (2013), qui organise notamment un concours de plaidoiries ; le Réseau des journalistes contre la peine de mort (2019) ; le Réseau des enseignant·es contre la peine de mort (2020); le Réseau des entrepreneur·es contre la peine de mort (2022), premier réseau de ce type au niveau mondial.

Cette décision n’aurait pas vu le jour s’il n’y avait eu, derrière, de longues années de plaidoyer et de travail de femmes et d’hommes, et des ONGs abolitionnistes. Les Abolitionnistes au Maroc, par leur détermination, ont pu détruire le silence, la peur et la résistance des conservateurs et des politiques qui manquaient de courage et de vision pour un Maroc sans peine de mort.

Me Abderrahim Jamai, coordinateur de la Coalition marocaine contre la peine de mort, à propos du vote du Maroc en faveur de la résolution des Nations unies pour un moratoire sur la peine de mort, le 17 décembre 2024

Des signes d’ouverture des décideurs politiques marocains depuis 2000

Cette décision politique s’inscrit dans la lignée de nombreux progrès observés dans le Royaume ces vingt dernières années, dont l’adoption de plusieurs réformes législatives. Parmi les jalons les plus marquants, on compte, en 2011, l’inscription du droit à la vie dans la Constitution, désormais garanti en son article 20 : « Le droit à la vie est le droit premier de tout être humain. La loi protège ce droit ». En 2014, la réforme du Code de justice militaire a abouti au retrait d’une dizaine de dispositions relatives à la peine capitale, limitant son champ d’application.

Des positions en faveur de l’ouverture du dialogue sur l’abolition sont en outre affirmées au plus haut niveau de l’État : en 2014, le roi s’est félicité des efforts menés par les associations abolitionnistes, dans une communication publique inédite légitimant la tenue d’un dialogue ouvert et les actions de la société civile.

Nous nous félicitons du débat autour de la peine de mort, mené à l’initiative de la société civile et de nombreux parlementaires et juristes. Il permettra la maturation et l’approfondissement de cette problématique.

Sa Majesté Mohammed VI, Deuxième forum national des droits de l’Homme à Marrakech, 2014

En 2004, le roi crée en outre l’Instance Équité et Réconciliation (IER), qui formule en 2006 dans son rapport final plusieurs recommandations relatives à la peine de mort, appelant notamment à la réduction du champ d’application de la peine capitale et à la ratification de l’OP2 – le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.

Plusieurs ministres de la Justice se sont exprimés publiquement en faveur de la progression vers l’abolition. En 2019, pour la première fois, le ministre marocain de la Justice alors en exercice a prononcé une allocution à l’ouverture au Parlement européen du 7e Congrès mondial contre la peine de mort organisé par ECPM. En 2020, le même ministre de la Justice avait invité la tenue d’un Séminaire parlementaire sur la peine de mort organisé par le CNDH, la Coalition marocaine et ECPM, dans l’enceinte même du ministère. En 2022, l’actuel ministre de la Justice a participé à la Conférence nationale et maghrébine sur la peine de mort organisée à Rabat par la Coalition marocaine contre la peine de mort, l’Observatoire marocaine des prisons et ECPM, y déclarant que la peine de mort est considérée comme l’un des points clés de la réforme de la justice pénale en discussion au Maroc.

Le Conseil National des droits de l’Homme au Maroc fait par ailleurs figure de chef de file de la lutte contre la peine de mort et s’est prononcé à multiples reprises en faveur de l’abolition, dans divers fora nationaux, régionaux et internationaux, collaborant régulièrement aux initiatives portées par la société civile et notamment la Coalition marocaine, les différents réseaux et ECPM. Pour la présidente du CNDH en exercice depuis 2018, « l’abolition de la peine de mort est une position institutionnelle affirmée et confirmée. »

La persistance des condamnations à mort par les tribunaux

Si l’abolition de la peine capitale est plus que jamais discutée, des condamnations à mort continuent d’être prononcées par les tribunaux. Entre 2010 et 2021, près de dix personnes ont été condamnées à mort chaque année, pour des faits de terrorisme ou pour des infractions de droit commun ayant un fort écho médiatique. Pour autant, le nombre de condamnations à mort prononcées est passé à 3 en 2022 puis 2 en 2023. Actuellement, 88 personnes condamnées à mort, dont une femme, seraient détenues dans les prisons marocaines.

Le nombre de personnes condamnées à mort incarcérées dans les prisons marocaines a considérablement diminué depuis trente ans, et notamment en raison de l’exercice du droit de grâce royale. Pour les autorités marocaines, « les grâces royales contribuent grandement à rééquilibrer la politique punitive ». Le roi Mohammed VI a exercé son droit de grâce à plusieurs reprises pour commuer des peines capitales en peine de prison à perpétuité, de manière collective ou individuelle, à l’occasion de fêtes nationales comme la fête du Trône ou de l’Aïd el-Adha : 156 personnes condamnées à mort en auraient bénéficié entre 2000 et 2023. 

Ces initiatives sont évidemment saluées par les acteurs de la société civile marocaine mais ces derniers s’inquiètent tout de même de voir le nombre de personnes sous le coup d’une condamnation à mort de nouveau augmenter de façon constante depuis trois ans.

Les prochains défis et engagements attendus du Maroc sur la peine de mort

Depuis une dizaine d’années, les autorités marocaines sont engagées dans un processus visant à réformer le Code pénal et le Code de procédure pénal. Le projet soumis par l’ancien ministre de la Justice comportait une diminution très importante du nombre d’infractions passibles de la peine de mort, passant de trente-six à onze. À la suite de la nomination d’un nouveau gouvernement, en octobre 2021, le projet de nouveau Code pénal a été retravaillé. À ce jour, le projet de révision du Code Pénal n’a pas encore été présenté au Parlement.

Le 10 décembre 2024, le ministre de la Justice a affirmé qu’il serait soumis avant la fin de la législature en cours et que ce nouveau texte ambitionne de doter le Maroc d’un cadre juridique moderne, « en phase avec les meilleurs standards internationaux en matière de droits de l’Homme ».

Aussi, en février 2025, un représentant du Ministère de la justice du Maroc est intervenu lors du panel de haut niveau sur la question de la peine de mort au Conseil des droits de l’Homme, afin de souligner le vote du Maroc en faveur de la Résolution mais également de présenter les pratiques en vigueur dans le Royaume et ses interactions avec les mécanismes et conventions internationales concernant la peine capitale. À cette occasion, le Maroc a indiqué que le projet de réforme du Code de procédure pénale prévoit d’introduire un mécanisme pour limiter le prononcé de la peine de mort en exigeant l’unanimité des magistrats, ainsi que la présentation de demandes de grâce automatique par le juge de l’application des peines pour les personnes condamnées à mort.

En savoir plus

La peine de mort en droit et en pratique au Maroc
Les conditions de détention des condamnés à mort au Maroc sont particulièrement éprouvantes. En 2013, un rapport du Rapporteur Spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants précisait que les détenus se sentaient infériorisés, marginalisés et oubliés.
Infographie – la peine de mort au Maroc (2023)
Témoignage
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À l’occasion des 30 ans de moratoire sur les exécutions au Maroc, la publication du…
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