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Le Maroc et la Tunisie ne doivent pas céder à la tentation d’un recul

Ces dernières semaines, deux crimes odieux ont particulièrement bouleversé les sociétés marocaines et tunisiennes, provoquant de violentes réactions en faveur de la peine capitale.

Au Maroc, suite à la découverte du corps d’un enfant âgé de 11 ans et de l’arrestation du suspect le 11 septembre, des voix se sont élevées notamment sur les réseaux sociaux et des pétitions ont circulé réclamant la reprise des exécutions.

En Tunisie, après la découverte du corps de Rahma Lahmar, le vendredi 25 septembre, des appels ont circulé sur les réseaux sociaux et des manifestations demandant l’application de la peine de mort ont été organisées dans les jours qui ont suivi l’arrestation d’un suspect. Le lundi 28 septembre, le président de la République a à son tour prôné le rétablissement de la peine de mort lors d’un Conseil de sécurité.

Ces deux pays célèbreront très prochainement 30 ans de moratoire sur les exécutions (Tunisie en 2021 et Maroc en 2023). En voie de consolider l’Etat de droit et d’évoluer vers un plus grand respect des droits de l’homme, une reprise des exécutions leur ferait accuser un grave recul.

Les voix demandant le rétablissement de la peine de mort ne sont pas majoritaires, bien au contraire. Les acteurs de la société civile mais aussi des personnalités issues de différents milieux se sont clairement exprimées contre, tant au Maroc qu’en Tunisie.

Au Maroc, la Coalition marocaine contre la peine de mort (CMCPM), le Réseau des avocats contre la peine de mort (RACPM) et le Réseau parlementaire contre la peine de mort (RPCPM) ont publié un communiqué conjoint, largement relayé dans les médias. Ils ont aussi appuyé le lancement d’un appel signé par plus d’une centaine de personnalités issues de tous les milieux et notamment du milieu artistique.

Le Conseil National des Droits de l’Homme a lui aussi réaffirmé sa position en faveur d’une abolition de la peine de mort.



La Coalition tunisienne contre la peine de mort (CTCPM) a publié un communiqué largement relayé dans les médias et divers acteurs de la société civile tunisienne se sont mobilisés pour faire entendre un autre discours.

Aujourd’hui, 149 Etats ont aboli la peine de mort en droit ou en fait. La tendance universelle est à l’abolition de la peine de mort. Alors que la Journée mondiale contre la peine de mort doit être célébrée le 10 octobre 2020 et que dans quelques semaines, les Etats membres de l’ONU seront appelés à se prononcer une nouvelle fois en faveur d’un moratoire universel pour l’application de la peine de mort, la multiplication des voix appelant à une application stricte de la peine de mort par la reprise des exécutions est particulièrement inquiétante. La Tunisie s’est d’ailleurs engagée à maintenir son vote favorable à la Résolution des Nations unies pour un moratoire universel à l’occasion de son examen par le Comité des droits de l’homme de l’ONU en mars dernier.

En outre, les critiques, propos insultants et attaques verbales à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme et des militants pour l’abolition de la peine de mort sont inacceptables et vont à l’encontre des engagements pris au Maroc et en Tunisie pour instaurer un débat apaisé et constructif tel qu’il devrait avoir lieu dans une démocratie. Un tel débat pourrait permettre d’atteindre progressivement l’abolition de la peine de mort.

Il ne s’agit pas de cautionner les crimes odieux qui sont commis. Les militants pour l’abolition de la peine de mort dénoncent fermement tout acte criminel mais rappellent aussi continuellement que l’Etat ne saurait devenir lui-même un criminel en ôtant la vie d’individus. Les autorités ne doivent pas céder aux appels à rétablir la peine de mort. Dans ces circonstances, ce n’est pas l’émotion qui doit guider les décisions politiques mais l’objectivité et le respect des valeurs liées à la justice et aux droits de l’homme.

ECPM et ses partenaires sont opposés à la peine de mort en tous lieux et en toutes circonstances. Partout dans le monde, la peine de mort est inefficace pour lutter contre le crime et ne rend pas la société plus sûre.


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